vendredi 3 juillet 2009

La pomme de discorde


Les habitués du 7/10 de France Inter et fans inconditionnels de la revue de presse commencent à pester : Frédéric Pommier sera démis de son poste à la rentrée. Il n'assurera plus sa chronique impertinente et rafraîchissante, dose de bon humour matinal. Le responsable? Il signe de son V, comme Viré : Philippe Val. La raison ? L'affaire Siné trop relayée par l'accusé. A peine installé dans son nouveau fauteuil à France Inter, l'ancien directeur de Charlie Hebdo fait déjà polémique.

V comme Viré

Ce jeudi 18 juin, sitôt arrivé à la direction de la radio, Philippe Val fait le ménage. Il commence par démettre Frédéric Pommier de la revue de presse. Ses arguments? C'est un travail qui ne convient pas au journaliste, apparemment en proie à un problème de "hiérarchisation de l'info". Et pourtant, c'est ce qui fait toute l'originalité de cette chronique : décalée mais pertinente, elle mêle sujets d'actualité et fait divers, faisant rebondir les thèmes entre eux, leur donnant ainsi une consonnance inédite et souvent humoristique, le tout rythmé par un ton et une voix si particulière.

L'obscur objet du litige

Philippe Val a toutefois assuré que sa décision n'avait rien à voir avec Charlie Hebdo. Il y a quelques mois, alors que Philippe Val est chroniqueur à Inter, il glisse un mot à Frédéric Pommier, lui reprochant de citer plus souvent Siné Hebdo que Charlie. Syndicats et auditeurs ne veulent pourtant pas en rester là. Une pétition circule déjà sur Internet et des groupes se sont constitués sur Facebook pour sauver le soldat Pommier. Pour l'intersyndicale de Radio France, le mot d'ordre est simple. Dans leur tract "Stop!", elle s'exprime clairement : «Notre confrère paye surtout le fait d'avoir cité Siné Hebdo dans la revue de presse. Philippe Val, à l'époque directeur (et actionnaire) de Charlie Hebdo, lui en avait vertement et devant témoins fait le reproche.» «La liberté éditoriale ne se discute pas», poursuit l'intersyndicale qui conclut ainsi : «Les syndicats SNJ, SNJ-FO, SNJ-CGT et SUD demandent solennellement à la direction de France Inter de revenir sur cette décision inacceptable pour toute la rédaction».

Indépendance, j'écris ton nom

Alors que l'indépendance des chaînes de télévision et radio nationales avaient été battues en brèche par les récentes décisions de Nicolas Sarkozy, cette nouvelle affaire se rajoute à une polémique déjà enflée. Plus généralement, l'indépendance des journalistes est souvent remise en question : Alain Duhamel chahuté par Rama Yade (cf. l'article du Figaro) ou moins récemment, ce cadre de TF1 viré pour avoir écrit un mail à sa députée, Mme De Panafieu, afin de dénoncer la loi Hadopi. Dans l'affaire Pommier, l'ironie réside dans la figure incarnée par Philippe Val : ardent défenseur de la liberté d'expression (notamment lors de l'affaire des caricatures de Mahomet, dont un film et un livre ont été tirés, tous les deux de très bonne qualité), l'affaire Siné (du nom du dessinateur démis par Philippe Val, pour ses dessins à tendance antisémites) était venue entacher ce portrait. Tout comme l'affaire Pommier.


Cette affaire est non seulement une mauvaise aubaine pour Philippe Val, fraîchement accueilli dans sa nouvelle maison. Mais ça l'est aussi pour le nouveau directeur de Radio France, Jean-Luc Hees, que l'agitation syndicale met dans l'embarras. D'autres dossiers restent prioritaires et risquent de faire encore du grabuge dans les couloirs de la Maison de la Radio : renégociation de la convention collective et préparation du budget sont autant de sujets délicats qu'il va être difficile d'aborder dans une ambiance électrique.

A lire : Le Blog de Frédéric Pommier, dans le même ton que sa revue de presse mais sur des sujets plus personnels, à ne pas louper!

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