mardi 3 mars 2009

Quand les jeux vidéos dérapent


Le 5 février dernier, huit députés ont déposé un amendement au projet de loi sur la réforme de l’hôpital. Les parlementaires demandent qu’on introduise « un message à caractère sanitaire » (sous forme de pictogrammes qu’on retrouve dans le système européen PEGI) lorsqu’un jeu vidéo présente « un risque en matière de santé publique en raison de son caractère potentiellement addictif ». C'est une loi controversée pour un problème qui prend de l'ampleur dans nos sociétés accros à la technologie.

L’addiction aux jeux vidéo, un problème de santé publique
Fin 2006, un amendement avait déjà été déposé, qui proposait l’interdiction pure et simple de certains jeux vidéos considérés comme nocifs. Cette idée d’addiction est récente et fait écho à de nombreux problèmes survenus chez des adolescents accros à WOW (World of War Craft qui se joue sur PC), le phénomène de jeu vidéo qui comptabilise déjà 5 millions de fans dans le monde entier. A l’automne 2005, deux jeunes ont été admis en hôpital psychiatrique, l’un d’eux ayant passé trois semaines sans quitter son écran d’ordinateur. En décembre de la même année, un coréen de 38 ans est mort d’épuisement après avoir passé dix jours non stop à jouer en ligne. Jouer trop longtemps aux jeux vidéos entraînerait donc un risque pour la santé mentale des utilisateurs, nécessitant de légiférer sur ce nouveau problème de société.

Un Etat trop paternaliste, des parents trop laxistes ?
Pour certains psychologues comme Yann Leroux, les jeux vidéos ne constituent pas une drogue, comme peuvent l’être l’alcool ou le cannabis. Il n’y aurait pas d’addiction, tout comme il n’y aurait pas de vertus thérapeutiques à faire progresser son cerveau sur sa Nintendo DS, entraînement cérébral du docteur Kawashima ou pas. Le problème vient principalement des limites que les parents ne savent plus imposer à leurs enfants. On peut raisonnablement jouer à des jeux (vidéo ou pas), sans pourtant autant tomber dans l’addiction. Pour certains spécialistes, ce n’est donc pas à l’Etat de faire son travail à la place des parents.
Dans une lettre adressée à la ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, le Syndicat National du Jeu Vidéo (SNJV) rappelle l’importance de l’industrie du jeu vidéo dans le marché du numérique en France. Un argument économique qui peine à convaincre face à des préoccupations de santé publique. Le syndicat souligne également le caractère thérapeutique que peuvent avoir les jeux vidéos. En soit, c'est un argumentaire bien maigre face aux accusations proférées.

Quid des accros aux jeux?
L’addiction n’existerait pas ? Que fait-on alors de ces milliers de geeks, scotchés à leurs écrans, prisonniers de leur chambre, perdant peu à peu la notion du temps, de l’appétit jusqu’à mettre leur santé en danger, ces jeunes (et moins jeunes) qui n’échangent désormais avec l’extérieur que par ordinateurs interposés, oubliant amis et petites copines, se coupant du monde réel pour se plonger dans un monde fictif, rempli d’orcs, d’elfes et de paladins. Des jeunes en face desquels les parents semblent désemparés : à la fois coupables d'avoir été si permissifs à l'encontre de leur enfant, tout en étant incapables d'aider leurs jeunes à "s'en sortir". On peut reprocher aux parents de ne pas avoir posé certaines limites, mais les constructeurs de jeux vidéos ont aussi leur part de responsabilité. Tout est fait pour que le jeu "online" ne s'arrête jamais, on enchaîne les missions, on découvre toujours de nouvelles fonctions ou personnages. Le jeu vidéo devient alors une histoire sans fin, qui continue même lorsqu'on se déconnecte. C'est pourquoi certains jeunes restent collés à leur écran parfois 20 heures d'affilée, pour ne pas perdre une miette du jeu en train de se faire.

Il me semble donc trop facile d’en vouloir aux hommes politiques de prendre à bras le corps un problème de santé publique et une question de société. Ou d'accabler seulement les parents. Une loi n’est peut-être pas la solution, mais elle ouvre en tout cas la voie à un débat et une reconnaissance de ce vrai problème qu’est l’addiction aux jeux vidéos.

2 commentaires:

  1. Hum. Ca me gène toujours d'entendre des gens parler de l'addiction aux jeux vidéos et citer des exemples lorsqu'ils n'y connaissent en fait rien.
    Quelles sont tes sources ? Sur quoi te bases-tu pour les "ces milliers de geeks, scotchés à leurs écrans,[...] dans un monde fictif, rempli d’orcs, d’elfes et de paladins." et "Tout est fait pour que le jeu "online" ne s'arrête jamais, on enchaîne les missions, on découvre toujours de nouvelles fonctions ou personnages." ?
    Je n'affirme pas que c'est faux (ça me parait vrai) mais tu n'as pas pris beaucoup de précaution pour le dire et ça me semble vraiment embêtant. On est dans le cliché, pas dans le constat.

    Et est-ce que les politiques prennent vraiment le problème à bras le corps ? J'ai plus l'impression qu'ils ne font qu'effleurer la surface... mais comment pourraient-ils faire autrement ? Le problème est complexe, comme beaucoup de problèmes...

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  2. Je me base sur un cas empirique : mon frère par exemple. Après, faut-il généraliser? Peut-être pas, et pourtant, on connaît tous au moins un geek dans son entourage, voire plus.
    Je pensais justement ne pas stigmatiser mais c'est vrai que j'ai peut être manqué de discernement et de nuance. Je pensais pourtant montrer les deux versants. Dans le second cas (de l'addiction), je parle de cas extrême, certes, il y a des palliers dans cet engouement pr les jeux. Ce nétait pas une critique injuste, j'ai joué à certains de ces jeux donc je ne pense pas être illégitime à en parler. Mais j'en rediscuterais volontiers avec toi par mail.

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