Ils récidivent : silence radio dans les salons de coiffure ce mardi. Le 7 juillet, la Fédération des coiffeurs d'Alsace avait lancé le mouvement : couper la musique pour protester contre l'augmentation des tarifs de la Spré (Société pour la perception de la rémunération équitable).
Ce 7 décembre, la Fédération nationale de la coiffure (FNC) a renouvelé l'opération, cette fois, auprès des 60 000 salons français. Avec un intitulé à la Philippe Katerine : « Les coiffeurs coupent le son. »
Tarifs rehaussés
La Spré collecte chaque année la « rémunération équitable », une taxe qui indemnise les artistes-interprètes et les producteurs. En échange, les salons peuvent diffuser radio et musique.
A cette taxe, s'ajoute celle de la Sacem qui rémunère cette fois-ci auteurs, musiciens et compositeurs. Elles s'appliquent à tous les lieux publics diffuseurs : salons, bars, restaurants, hôtels ou magasins.
Le 5 janvier, suite à une commission paritaire, l'augmentation des tarifs de la Spré a été votée. Les prix ont donc doublé cette année. En 2009, ils représentaient 18,5% des droits d'auteurs, contre 35% aujourd'hui et 65% d'ici 2011. En clair, l'an dernier, un salon qui devait 24 à 35 euros de redevance à la Spré paie aujourd'hui 60 euros, puis en paiera 90 en 2011. Le tout majoré de 47 euros par salarié supplémentaire pour les entreprises de plus de trois employés. Sans compter le surplus dû à la Sacem.
Ça sème la discorde
Pour Pierre Jabouley, directeur général de la Spré, la hausse est légitime :
« On n'a pas augmenté les tarifs depuis 1987. Et les prix partaient de très bas. »
Avant d'ajouter, peu inquiet de cette deuxième mobilisation :
« C'est normal de protester mais il faut relativiser : 90 euros, c'est le prix de trois coupes de cheveux. Ça vaut mieux que de perdre un ou deux clients. »
Un argument qui ne convainc pas Bernard Stalter, vice-président de la FNC.
« On ne veut pas se braquer mais retourner à la table des négociations. »
Ses revendications :
- lisser la hausse sur cinq ans,
- obtenir un siège à la commission paritaire,
- accorder une remise de 20% aux entreprises adhérentes.
« En juillet, en Alsace, sur 1 500 salons, 900 ont renvoyé la pétition, plus de la moitié ! J'espère qu'aujourd'hui la mobilisation sera aussi forte. »
« Un salon sans musique, c'est mortel »
Difficile de savoir combien de salons ont répondu à l'appel. Sur Internet, la pétition a recueilli 345 signatures pour le moment. A Grenoble, par exemple, tous les coiffeurs n'ont pas suivi l'initiative de la FNC. La radio continue donc de ronronner dans certains établissements. Mais dès qu'on leur parle des tarifs de la Spré, les langues des coiffeurs se délient.
Hervé a ouvert son salon il y a dix ans. Il a aujourd'hui deux salariés et un apprenti.
« C'est la première cliente que j'ai coiffée ce matin qui me l'a appris. J'ai donc décidé de couper la radio. J'ai ressorti mes deux dernières factures : je paie environ 200 euros, dont 180 pour la Sacem et 30 pour la Spré.
C'est déjà cher, surtout pour de la radio. Je trouve ça vraiment lourd. »
Catherine a, elle, laissé tomber depuis longtemps la Sacem et la Spré :
« J'ai entendu parler du mouvement ce mardi matin à la radio. Ici, ça fait longtemps qu'on ne paie plus la Sacem et la Spré.
On voulait préserver la tranquillité de nos oreilles et nos esprits dans le salon. Un peu celle de notre portefeuille aussi. Les sommes à payer étaient indues, trop importantes pour le service rendu.
Les artistes doivent être payés mais je comprends aussi les coiffeurs. »
Cécile, qui a repris le commerce de sa mère depuis un an et demi : « Je n'arriverais pas à travailler sans. »
« Ce n'est jamais agréable de voir augmenter les tarifs. Je suis au courant du mouvement et je ne suis pas d'accord avec l'augmentation. Mais j'avoue qu'aujourd'hui, je laisse la radio.
Je n'arriverais pas à travailler sans. Un salon sans musique, c'est mortel. »
Pierre, cinq salariés : « Tout augmente de toute façon. »
« Je n'étais pas au courant du mouvement. Mais je suis d'accord, on paie déjà trop cher. On ne peut pas répercuter la hausse sur nos clients qui sont aussi dans des situations difficiles.
Tout augmente de toute façon, le prix des produits, les charges patronales, l'électricité aussi. Mais nous, on ne peut pas augmenter nos tarifs, au risque de perdre la clientèle. »
En attendant de voir leurs revendications entendues par la Spré, silence radio ou non, la petite musique des coiffeurs mécontents continuera à se faire entendre.
Publié sur Rue89 le 7 décembre 2010.
Et ca va de mal en pire, la spré s'attaque aussi au bar et restaurant avec une augmentation passant de 18% de la sacem à 1.65% du CA HT. Personnellement je passe de 72 euros de spré par an à 4950 euros. Autant dire que je vais certainement passer sur du LAL (licence art libre) ou CC (commons creative)
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